Qu'est-ce qu'un élément essentiel du contrat de travail ?
Un élément est essentiel lorsque les parties décident dans le contrat qu'il le soit. Sur ce point les parties sont entièrement libres. Elles peuvent par exemple décider qu'il est essentiel que le salarié soit titulaire du permis de conduire. La jurisprudence a par ailleurs considéré que le temps de travail et le salaire sont en principe des éléments essentiels. Cette position est logique car le temps de travail permet au salarié d'organiser sa vie familiale. Le salaire quant à lui offre au salarié la possibilité d'organiser sa vie sur le plan économique et de faire des projets de vie. [Cass soc 03/03/1998 n°95.43.274 Cass soc. 20.10.1998 n°96.40.614].
Temps de travail : Quelle est la position des tribunaux sur la modification d'un élément essentiel du contrat de travail ?
La modification d'un élément essentiel du contrat suppose l'accord écrit du salarié. La vérification de l'accord du salarié est systématiquement effectuée par les juges. Ainsi, la modification d'un élément essentiel du contrat de travail imposée par l'employeur justifie la résiliation judiciaire du contrat ou une prise d'acte de rupture du contrat entraînant la condamnation de l'employeur [Cass soc 12/06/2014 n°12.29.063 et 13.11.448].
Ainsi, l'acceptation tacite du salarié n'est pas retenue par les juges quand bien même la modification est favorable au salarié [Cass soc. 28.01.1998 n°95.40.275].
Existe-t-il des dérogations à la position des juges sur la modification du contrat de travail ?
On observe à ce jour des nuances en matière de modification des élément essentiels du contrat de travail.
Dans un arrêt du 14 décembre 2016 [Cass soc 15.2163], la Cour de cassation a considéré qu'un salarié ne pouvait s'opposer à la modification unilatérale par l'employeur de la répartition de l'horaire de travail du salarié au motif que le contrat de travail prévoyait que les horaires de travail pourraient être modifiés.
La Cour a considéré que les parties semblaient avoir décidé que la modification de l'horaire de travail n'était pas un élément essentiel en raison de la volonté des parties. Semblant se justifier la Cour a toutefois exercé un contrôle quant à l'équilibre des rapport contractuels. Elle a pris soin de vérifier et de remarquer que :
- Les nouveaux horaires n'affectaient pas le droit au repos de la salariée.
- Les nouveaux horaires ne portaient pas une atteinte excessive à sa vie personnelle et familiale du salarié.
A première vue, il semblerait que cette décision soit dans le prolongement de la jurisprudence qui permet les dérogations au principe de la modification d'un élément essentiel lorsque les parties le décident au préalable dans le contrat.
Toutefois, la Cour semble justifier sa décision puisqu'elle la motive ce qui présuppose la possibilité d'exceptions encadrées par les juges lorsqu'il s'agit de l'horaire de travail.
Il va sans dire que cette décision, sauf jurisprudence contraire, ouvre la voie à la modification unilatérale par l'employeur de la répartition du temps de travail du salarié, la limité étant le bouleversement de la vie familiale.
Cet arrêt nous semble aller dans l'esprit des dispositions de la loi EL KHOMRI en matière de temps de travail, lesquelles offrent la possibilité à l'employeur de modifier relativement facilement le temps de travail et l'organisation de ce dernier.
Affaire à suivre.